Accord SACEM/YouTube : enfin une offre légale et lucrative pour les auteurs
Cela faisait plus de 3 ans que la SACEM était en pourparlers avec YouTube, pour légaliser l'offre diffusée sur ce site. Le 30 septembre 2010 à Paris, la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) a enfin signé un accord à effet rétroactif avec la plateforme YouTube. Les contenus diffusés en France sur le site Youtube de 2006, année de lancement de la plateforme, jusqu'à fin 2012, seront désormais une nouvelle source de revenus pour les auteurs adhérents de la SACEM. Entre création de l'HADOPI et légalisation des sites de partage, la lutte pour le respect des droits d'auteur sur internet est en marche
L’accord SACEM-YOUTUBE : une solution à l’amiable
Les termes financiers et le contenu du contrat entre la SACEM et YOUTUBE n’ont pas été dévoilés. Il est l’aboutissement d’une longue négociation entre les deux partenaires.
YouTube craignait une action devant les juridictions civiles et pénales par la société de droits d’auteurs. La plateforme hébergeait en effet des vidéos, dont certaines appartenaient au répertoire de la SACEM, sans pour autant verser des droits à la société d’auteurs. La SACEM compte plus de 40 millions d’œuvres musicales inscrites, et en sa qualité d’hébergeur, Youtube était donc responsable des atteintes aux droits des auteurs, dès lors que la SACEM lui signalait la présence de contenus illicites.
En fermant les yeux sur la mise en ligne, de la part des internautes, de vidéos reproduisant tout ou partie d’œuvres musicales ou cinématographiques, Youtube s’exposait à des sanctions pécuniaires importantes pour contrefaçon de droits d’auteur.
YouTube avait déjà été inquiété par d’autres sociétés d’auteurs. En 2007, Viacom (MTV, Paramount) avait exigé du site de vidéos le retrait de 100 000 vidéos.
Afin d’éviter les poursuites, YouTube a signé plusieurs contrats, dans la veine de celui signé hier avec la SACEM, avec d’autres sociétés d’auteurs situées en Allemagne, Italie, au Royaume-Uni, en Irlande, au Pays-Bas ou encore en République Tchèque.
Mais, YouTube n’est pas le seul hébergeur de contenu sur Internet à prendre quelques libertés avec la législation sur le droit d’auteur.
En effet, Google Book avait par exemple été assigné fin 2009 par les éditions La Martinière et le Syndicat national de l'édition et condamné à des dommages et intérêts.
Aujourd’hui, par l’accord avec la SACEM, YouTube entend bien rectifier le tir en soutenant la création et en valorisant les œuvres des artistes disponibles en ligne : « Ce contrat couvre la diffusion en France sur la plateforme vidéo en ligne du répertoire musical mondial, et notamment les répertoires anglo-américains des éditeurs multinationaux, ainsi que des autres œuvres gérées par la SACEM, depuis le lancement de YouTube jusqu'à fin 2012 ».
« Grâce à cet accord, les auteurs, les auteurs-réalisateurs, les humoristes, les compositeurs et les éditeurs de musique dont le répertoire est géré par la SACEM vont être rémunérés pour la diffusion de leurs œuvres sur YouTube », ont expliqué les deux signataires de l’accord.
La rémunération des auteurs sur YouTube, une utopie ?
La signature de cet accord, demeurant pour l’instant confidentiel, conduit à s’interroger notamment sur l’effectivité de cette rémunération par une plateforme gratuite comme Youtube : De quelles façons YouTube, hébergeur de contenus mis en ligne par les internautes, va-t-il pouvoir contrôler le contenu de ses diffusions et rémunérer les artistes concernés ?
De quels moyens disposera t-il pour vérifier si le contenu de la diffusion est soumis ou non à des droits d’auteurs protégés par la SACEM ?
Tous les jours, ce sont deux milliards de vidéos qui sont visionnées sur YouTube.
Pour Christophe Muller, directeur Europe du Sud, de l'Est et Moyen-Orient du site, il semblerait que l’application de l’accord YouTube-SACEM soit difficile à mettre en œuvre : « Nous avons plus de vingt-quatre heures de vidéos mises en ligne chaque minute. Etablir une répartition juste dans ce cadre est d'une grande complexité. »
Mais ce dernier a indiqué préférer que son site puisse présenter à l’avenir une offre légale : « je suis heureux d'avoir signé cet accord avec la Sacem, qui permettra à ses membres de toucher de nouveaux revenus grâce au site, et de faire émerger de nouveaux talents »
Une chose est sûre, d’après l’accord, la rémunération de la diffusion en ligne sur Youtube du répertoire musical mondial:
- concernera les diffusions sur le territoire français luxembourgeois et monégasque.
- concernera les contenus appartenant au répertoire de la SACEM, en faveur des auteurs membres de la SACEM
- sera rétroactive, pour des contenus diffusés sur YouTube à compter du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2010.
Combien les artistes vont-ils gagner ? « Tout dépend du mode des formats publicitaires choisis : bannière, publicité avant ou après la vidéo, liens textes inclus dans la vidéo, etc. » répond YouTube.
Pour Catherine Kerr-Vignale, membre du directoire de la SACEM, la rémunération offerte par Youtube semble équitable : « ce qui est important, c'est qu'une très grosse plate-forme mondiale ait accepté de payer des droits à une société de gestion collective. »
Une rémunération à l’image de Dailymotion ?
La SACEM, soucieuse de protéger les droits de ses auteurs avait déjà signé un contrat du même type avec un autre géant de la diffusion vidéo, à savoir Dailymotion.
En vertu de ce partenariat, Dailymotion verse à la SACEM les droits pour les œuvres qu'elle héberge, la rémunération étant calculée à partir des recettes publicitaires dégagées par Dailymotion.
Aussi, le président de la SACEM affirme avoir prévu pour le contrat avec Youtube, les mêmes modalités de rémunération : « Les bases sur lesquelles le contrat avec YouTube est bâti sont les mêmes. On a réfléchi sur les mêmes principes », a précisé le président du directoire de la Sacem
A propos de YOUTUBE
YouTube est un site web d’hébergement de vidéos sur lequel les utilisateurs peuvent envoyer, visualiser et partager des séquences vidéos.
Il a été créé en février 2005 par trois anciens employés de PayPal.
Le 9 octobre 2006, Google a racheté YouTube pour un montant de 1,65 milliard de dollars en nouvelles actions, ce qui constitue la seconde plus grosse opération d'acquisition de Google.
Le 19 juin 2007, Eric Schmidt, le PDG de Google a lancé la version française de YouTube en vue de concurrencer Dailymotion.
A propos de la SACEM
La Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) est une Société de gestion des droits d'auteur, créée en 1851. Elle est au service des auteurs d’œuvres musicales, qu’ils soient auteurs, compositeurs, chanteurs ou éditeurs.
C'est une société civile reconnue et contrôlée par l'État français et chargée d'une mission de service public, mais disposant d’un statut de droit privé.
Son objectif : la gestion collective de la collecte et de la répartition des droits d'auteurs des œuvres musicales de son catalogue qui sont perçus lors d'une diffusion en public ou lors de leur reproduction sur différents supports.
La SACEM représente la majorité du répertoire musical en France.