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Les arrangements entre associés à l'aide des salariés

Publié par Michaël NEUMAN le 22/06/2012 - Dans le thème :

Emploi et vie professionnelle

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La Cour de Cassation est venue apporter deux moyens supplémentaires aux salariés de contester leur licenciements, en s'appuyant sur des conventions auxquelles ils ne sont pas partie.


Le principe de l'opposabilité, par un tiers, des engagements pris par les parties à un contrat

On rappellera qu'en droit, l'article 1165 du Code Civil prévoit que :

"Les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne nuisent point au tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu par l'article 1121."

Si l'absence d'effet des contrats vis-à-vis des tiers est systématiquement martelée en jurisprudence, les tribunaux, dépassant l'exception de l'article 1121 (qui prévoit la stipulation pour autrui), n'en ont pas moins élargi les cas dans lesquels les conventions pouvaient profiter aux tiers.

Cet élan a été concrétisé par un arrêt majeur de l'assemblée plénière de la Cour de Cassation en date du 6 octobre 2006, dont l'attendu de principe énonce :

“Le tiers à un contrat peut invoquer, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, un manquement contractuel dès lors que ce manquement lui a causé un préjudice”

En résumé : si des personnes ont conclu un contrat dont le non-respect vous porte préjudice, vous pouvez invoquer cette faute, même si vous n'avez pas signé ledit contrat.

Cette décision n'a pas encore porté tous ses fruits : toutefois, en matière de droit des sociétés, les deux arrêts ci-après évoqués marquent une étape supplémentaire dans l'usage, par les tiers, de conventions auxquelles ils ne sont pas partie.


L'opposabilité, par les tiers, des dispositions d'un pacte d'associés ou d'actionnaires

Le pacte d'associés ou d'actionnaires a pour vocation de régir des points spécifiques dans les relations entre les propriétaires d'une société, que ceux-ci ne peuvent ou ne veulent pas voir dans les statuts.

Le pacte, qui n'est pas obligatoire, a généralement un caractère confidentiel.

Dans l'espèce traitée par la Chambre Sociale de la Cour de Cassation, à l'occasion d'un arrêt rendu le 18 mars 2009, un clerc-généalogiste avait eu vent de l'existence d'un pacte d'actionnaires régissant les relations entre les propriétaires de la société qui l'employait. Ayant fait l'objet d'une mesure de licenciement, il a invoqué le non-respect d'une disposition de ce pacte qui prévoyait une autorisation préalable du conseil de surveillance de son employeur pour tout licenciement de cadre supérieur.

L'on ne sait pas si le pacte prévoyait son propre caractère confidentiel ou non, mais cette disposition n'aurait de toute façon pas été opposable au salarié.

La Cour de Cassation lui a donc donné raison et a affirmé que le pacte pouvait être opposé à la société par un salarié.

On notera que l'employeur, c'est-à-dire la société, est elle-même tiers au pacte, qui est un engagement pris entre les actionnaires.

Le raisonnement de la Cour permettrait donc, dans la relation contractuelle employé/employeur, de soutenir que le non-respect d'engagements pris par des tiers (en l'occurrence, les actionnaires de l'employeur) peut être utilement invoqué et opposé.

A lire cette décision, il serait donc possible de soutenir qu'un tiers à un contrat puisse opposer à un autre tiers à ce même contrat, les dispositions qui lui portent préjudice !

En réalité, la situation est bien spécifique, dans la mesure où l'on oppose en réalité à la société, personne morale, ses propres règles de fonctionnement. Elle est certes tiers aux statuts, mais elle est l'objet même de ces statuts. La chicane à l'article 1165 du Code Civil se justifie pleinement.


L'opposabilité, par les tiers, des dispositions statutaires

Qui peut le plus peut le moins : les statuts sont également des accords entre les actionnaires, avec cette différence, par rapport aux pactes d'associés ou d'actionnaires, qu'ils sont fondateurs et qu'ils peuvent être facilement connus des tiers.

Dans une affaire jugée par la Chambre Sociale de la Cour de Cassation le 15 février 2012, une clause des statuts d'une SAS prévoyait que tout licenciement serait soumis à l'autorisation préalable des actionnaires. Le directeur général, qui n'était pas actionnaire, avait été licencié sans que cette autorisation n'existe. Revendiquant, sur le fondement des statuts, un licenciement sans cause réelle et sérieuse, il a eu gain de cause.

En général, les statuts de SAS sont plus susceptibles d'accueillir ce type de clauses d'autorisation préalable au licenciement de salariés que ceux, largement balisés, de SA ou de SARL.

Ainsi, tout salarié licencié au sein d'une telle structure aura donc intérêt à vérifier le contenu des statuts de son ancien employeur, afin de voir s'il peut tirer profit d'un manquement ou d'un oubli, dans la mise en œuvre des règles de fonctionnement interne de la société, au moment de son éviction.


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