Pas d'entretien préalable à un avertissement sauf si un licenciement est lié à l'existence préalable d'avertissements

Publié par Sébastien CHARRIÈRE le 13/05/2011 - Dans le thème :

Emploi et vie professionnelle

| Lu 9069 fois |
0 réaction

L'avertissement, la sanction la moins élevée dans l'échelle des sanctions disciplinaires puisque n'ayant aucune conséquence directe sur le maintien du salarié dans la structure, n'oblige pas l'employeur à respecter la procédure disciplinaire. En effet, vous pouvez parfaitement notifier une sanction par lettre recommandée avec accusé de réception ou par une lettre remise en mains propres contre décharge sans rencontrer au préalable l'intéressé ou même le prévenir d'une quelconque façon. Il en va toutefois autrement si le règlement intérieur lie le sort d'un éventuel licenciement à l'existence d'avertissements comme le précise la Cour de cassation le 03 mai dernier.

La procédure disciplinaire, qui exige la tenue d'un entretien préalable avant le prononcé d'une sanction, ne s'impose normalement pas dans le cadre d'un avertissement. La justification repose sur l'absence d'impact direct de cette sanction mineure sur le maintien du salarié dans son emploi (licenciement) ou sur son contrat de travail (rétrogradation ou mutation). La seule notification de l'avertissement au salarié concerné permet à l'employeur de conserver pendant 3 ans au dossier cette sanction qui se verra reconnaitre une existence juridique pleine et entière.

Toutefois, comme l'entend ce salarié qui a reçu son avertissement sans avoir bénéficié d'un entretien préalable, ce dernier ne doit-il pas être tenu lorsque le règlement intérieur de la structure prévoit que tout licenciement hors faute grave devra être précédé de deux avertissements pour pouvoir être validé ? En effet, dans ce cas précis, le licenciement est intrinsèquement lié à l'existence d'avertissements préalables. De fait, chaque avertissement est potentiellement lié au maintien du salarié dans son emploi même s'il n'en n'est pas la cause directe.

D'un autre côté, on pourrait tout aussi facilement affirmer, que par définition, un avertissement est la sanction disciplinaire qui consiste à prévenir le salarié que si son comportement fautif se poursuit, il serait susceptible de subir une faute pouvant avoir une conséquence sur son contrat de travail et son maintien dans l'emploi. Ainsi, tout avertissement est en principe potentiellement lié à l'existence d'un futur licenciement.

La présence d'une telle stipulation au règlement intérieur change-t-elle finalement tant que cela la donne ? Pour la chambre sociale de la Cour de cassation qui a été saisie d'une telle affaire, il ne fait aucun doute que oui. En effet, selon elle "si l'employeur n'est en principe pas tenu de convoquer le salarié à un entretien avant de lui notifier un avertissement, il en va autrement lorsque, au regard des dispositions d'un règlement intérieur, l'avertissement peut avoir une influence sur le maintien du salarié dans l'entreprise et tel est le cas lorsque le règlement intérieur, instituant ainsi une garantie de fond, subordonne le licenciement d'un salarié à l'existence de deux sanctions antérieures pouvant être constituées notamment par un avertissement".

Une nouvelle fois, employeur, prenez grand soin à la rédaction de votre règlement intérieur car vous êtes pieds et poings liés par celui-ci en matière disciplinaire et une faute réellement commise peut voir sa sanction annulée même si elle est au fond justifiée.

Cass. soc. 3 mai 2011, n°10-14104 , publié au bulletin