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Harcèlement, stress au travail et démission : ce que disent les juridictions…
Emploi et vie professionnelle
| Lu 10355 fois | 1 réactionLe contexte de harcèlement peut dans certains cas expliquer la décision du salarié de démissionner. Dans pareille situation à quelles indemnités pourrait prétendre le salarié ? Faisons le point sur la jurisprudence.
I – CONDITION DE VALIDITE DE LA DEMISSION
Pour autant, pour être valable, la démission doit répondre à certains critères.
Notamment, une démission ne peut résulter que d'une manifestation non équivoque de volonté de la part du salarié (Cass. soc., 21 mai 1980, n° 78-41.833).
À défaut, il est impossible d'imputer au salarié la rupture de son contrat de travail (Cass. soc., 30 mai 2000, n° 98-40.265).
La démission doit donc résulter uniquement de la libre décision du salarié, sans aucune arrière pensée vis à vis d'une attitude fautive de l’employeur, comme pourrait l'être précisément une situation de harcèlement moral.
Ainsi pour être intègre, la décision du salarié de démissionner ne doit pas être la conséquence d'actes de harcèlement moral.
II – NULLITE DE LA DEMISSION PROVOQUEE PAR LE HARCELEMENT
Dans de nombreuses situations, la Cour de Cassation a été amenée à confirmer que ne constitue pas une démission valable, la décision du salarié de résilier son contrat de travail :
• – lorsque cette décision découle de l'attitude de l'employeur
envers le personnel de l'entreprise de nature à créer un climat social
insupportable aux effets néfastes pour la santé des salariés (Cass.
soc., 30 mars 2011, n° 09-43.123) ;
• – lorsque cette décision
est consécutive à des brimades ou à des mesures vexatoires de
l'employeur (Cass. soc., 20 déc. 2006, n° 05-43.548. – Cass. soc., 26
mai 2010, n° 08-70.253) ;
• – lorsque cette décision
intervient peu de temps après que l'employeur ait pris, à l'encontre de
ce salarié, de multiples sanctions disciplinaires injustifiées (V. en ce
sens Cass. soc., 4 juin 2009, n° 07-45.239).
En conséquence, le salarié peut exercer contre son employeur, devant la juridiction prud'homale, un recours en nullité de sa prétendue démission (Cass. soc., 9 mai 2007, n° 05-41.324 et n° 05-41.325).
III – NULLITE MESURES FONDEES SUR LE HARCELEMENT
1. Principe d’interdiction
En matière de harcèlement moral, l’'article L. 1152-1 du Code du travail dispose qu' :
“aucun
salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l'objet d'une mesure
discriminatoire, directe ou indirecte, notamment en matière de
rémunération, de formation, de reclassement, d'affectation, de
qualification, de classification, de promotion professionnelle, de
mutation ou de renouvellement de contrat pour avoir subi ou refusé de
subir des agissements répétés de harcèlement moral ou pour avoir
témoigné de tels agissements ou les avoir relatés”.
L'article
L. 1152-2 du Code du travail rappelle qu'aucun salarié ne peut faire
l'objet d'une mesure à son encontre pour avoir subi ou refusé de subir
des agissements répétés de harcèlement moral.
Les textes légaux interdisent donc toute forme d'atteinte possible au salarié : sanction, licenciement, mesure discriminatoire, directe ou indirecte.
2. Nullité du licenciement et conséquences
Selon l'article L. 1152-3 du Code du travail, "toute rupture du
contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des
articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte
contraire est nul".
L'article L. 1153-4 du même code pose la même règle en matière de harcèlement sexuel.
En conséquence, si la mesure prise à l'encontre du salarié est un licenciement, celui-ci est nul.
Théoriquement, il emporte donc réintégration du salarié évincé avec indemnisation de la période d'éviction.
En
pratique, le salarié victime de harcèlement ne souhaite plus retourner
dans l’entreprise ; il aura donc droit aux indemnités de rupture
(licenciement et préavis) et à une indemnité réparant l'intégralité du
préjudice résultant du caractère illicite du licenciement et au moins
égale à celle prévue par l'article L. 1235-3 du Code du travail
(équivalente à 6 mois) (Cass. soc., 27 juin 2000, n° 98-43.439).
Selon la Cour de cassation, cette indemnité minimale est due
"quelle que soit l'ancienneté du salarié dans l'entreprise" et le
montant ne peut donc pas être diminué au motif que l'intéressé ne
justifie pas de 6 mois de présence dans l'entreprise (Cass. soc., 14
avr. 2010, n° 09-40.486).
3. Autres mesures fondées sur le harcèlement sanctionnées
De même, il a été jugé que l'employeur ne pourra se prévaloir de la
perturbation du fonctionnement de l'entreprise s'il est établi que les
absences répétées du salarié trouvent leur origine dans un harcèlement
moral (Cass. soc., 16 déc. 2010, n° 09-41.640).
La Cour considère
qu'une salariée dont le comportement répréhensible était une réaction
au harcèlement moral dont elle avait été victime, peut, à bon droit,
solliciter l'annulation de son licenciement. La Cour de cassation
revient "à la source" des agissements dans la mesure où le harcèlement
moral et le climat délétère semblaient être la cause principale, voire
exclusive, dudit comportement, lequel aurait été bien différent dans un
contexte de travail pacifié (Cass. soc., 29 juin 2011, n° 09-69.444).
MON CONSEIL
Le
salarié victime de tels agissements devra néanmoins agir avec prudence
et matérialiser les reproches formulés à l’encontre de l’employeur par
écrit avant d’envisager une démission ou encore une prise d’acte de
rupture.
En effet, bien que la jurisprudence soit encourageante
pour les victimes de tels agissements, ce mode de rupture n’ouvre en
principe pas droit aux allocations d’Aide au Retour à l’Emploi et oblige
le salarié à engager une action devant la juridiction prud’homale.
Lorsque
la rupture du contrat est devenue inéluctable, d’autres solutions plus
favorables au salarié telles que la résiliation judiciaire peuvent être
envisagées.
Pour plus d’information, un conseil ou une assistance, je vous réponds en ligne sur :
www.canini-avocat.com
Claudia CANINI
Avocat à la Cour
Nos précédentes publications sur le sujet :
http://www.canini-avocat.com/Pages/demissiondusalarie_faute_de_lemployeur_canini_avocat_enligne_droitdutravail.aspx)
http://www.legavox.fr/blog/canini-formation/harcelement-et-violence-au-travail/type.php?id_theme=804
J'ai déjà matérialisé les reproches formulés le 22/02 et le 03/06/ par recommandé accusé de réception à mon employeur, sans réponses de sa part.
Cordialement