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Contester une décision de sursis à statuer : pas si simple...

Publié par Michaël NEUMAN le 24/01/2013 - Dans le thème :

Procédures en Justice

| Lu 24535 fois |
3 réactions

Dans un contentieux judiciaire, il peut paraître opportun à un juge de ne pas prendre de décision immédiate, du fait de l'occurrence prochaine d'un événement susceptible d'avoir une influence sur le sort du litige.

Ces événements peuvent être multiples car, si le code de procédure civile impose, dans certains cas, le sursis à statuer, cette mesure relève généralement de l' « appréciation souveraine » des juges du fond.

Les premiers juges saisis du litige rendront donc un jugement que l'on nomme « avant dire droit », qui ne tranche pas le principal de la demande concernée et renvoie les parties à saisir de nouveau les mêmes juges, une fois que l'événement se sera produit.

Lorsqu'une partie estime que la décision de sursis à statuer ne se justifie pas, elle peut vouloir la contester, ce qui n'est pas un exercice facile.

I. Ce que disent les textes

L'article 380 du code de procédure civile dispose :

"La décision de sursis peut être frappée d'appel sur autorisation du premier président de la cour d'appel s'il est justifié d'un motif grave et légitime.

La partie qui veut faire appel saisit le premier président, qui statue dans la forme des référés. L'assignation doit être délivrée dans le mois de la décision.

S'il fait droit à la demande, le premier président fixe le jour où l'affaire sera examinée par la cour, laquelle est saisie et statue comme en matière de procédure à jour fixe ou, comme il est dit à l'article 948, selon le cas."

Il existe donc plusieurs conditions pour pouvoir interjeter appel d'une décision de sursis à statuer :

- Tout d'abord, saisir, pour autorisation, le premier président de la Cour, statuant dans la forme des référés.

Cette saisine se réalise par voie d'assignation qui doit être délivrée dans le mois de la décision de sursis à statuer, et non pas dans le mois de sa signification.

- Ensuite, il doit être justifié devant le premier président, d'un motif « grave et légitime ».

Ici, le premier président peut librement apprécier ce qu'est un motif grave et légitime.

Toutefois, il doit se prononcer sur la gravité et la légitimité du motif au regard de la décision de sursis à statuer et pas du litige à trancher.

En effet, il a été jugé à plusieurs reprises que le premier président ne doit pas se prononcer sur le bien-fondé du jugement pour apprécier la légitimité du motif d'appel de la décision de sursis.

Cela signifie concrètement qu'il convient de justifier qu'une décision au fond doit être rendue rapidement, que les conditions de sursis, quand il est de droit, ne sont pas réunies ou encore que le terme du sursis est aléatoire.

Si l'appel a été autorisé, il devra être formalisé dans le mois de la décision rendue par le premier président.


II. Quelques cas particuliers

2.1. Il existe une hypothèse notamment où l'on peut passer outre la procédure d'autorisation : c'est l'hypothèse d'un jugement dit « mixte », qui tranche une partie du principal et qui, pour le surplus, décide d'un sursis à statuer.

Face à une telle décision, il est possible d'en interjeter appel directement, sous réserve que le plaideur conteste l'ensemble du jugement et pas la seule partie relative au sursis à statuer.


2.2. Lorsque la décision de sursis a été rendue en dernier ressort, c'est-à-dire lorsque la voie de l'appel n'est pas ouverte contre la décision, il reste néanmoins la possibilité de se pourvoir en cassation.

Cependant, au-delà de la longueur même des procédures en cassation et de leur coût, l'article 380-1 du code de procédure civile prévoit que la voie du pourvoi n'est ouverte que pour « violation de la règle de droit ». Il faut comprendre par là la violation de la règle relative au sursis à statuer, ce qui vise exclusivement les cas où le sursis est de droit.


Conclusion

On le voit, contester un sursis à statuer est loin d'être chose simple et celui qui souhaite s'engager sur cette voie devra disposer d'excellents motifs pour ce faire ainsi que d'une bonne maîtrise des règles et délais procéduraux !


Les derniers commentaires (3)
rocdel a écrit le 04/04/2013 à 09:28:44
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Mon cher Maître,
N'oubliez pas d'une part que ce que vous avez écrit ne vaut que pour la procédure avec représentation obligatoire. En matière de procédure sans représentation obligatoire (procédure orale, les formes de l'appel sont quelques peu différentes et ne prévoient nullement la possibilité de limiter l'appel à certains chefs du jugement(901 est différent de 932 et 933 du CPC. Par ailleurs, au vu de 562 du CPC en cas d'appel visant à l'annulation du jugement, l'effet dévolutif porte sur la totalité de la décision.


rocdel a écrit le 04/04/2013 à 09:29:39
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Entendu hier 4 avril 2013 de la bouche d'un substitut du PG de la Cour de Paris,sur la réplique qui lui était faite à son moyen d'irrecevabilité de l'appel d'une décision rendue en matière de procédure sans rep oblig et mixte car elle avait tranché une partie du principal, : " Cette décision ( qui renvoyait l'examen de différentes demandes à une audience ultérieure après accomplissement d'une mesure provisoire) n'est pas un sursis à statuer et il n'y a pas de mesure provisoire. L'appelant a simplement été "invité" à effectuer une mise à niveau ( ah bon! ce n'est pas une mesure provisoire...!)et l'examen des demandes non jugées a été renvoyé à une date postérieure à l'accomplissement du "stage". Ce n'est pas un sursis à statuer , simplement le tribunal (en fait une commission)n'a pas jugé"....!
Alors sauf erreur de ma part si ce n'est pas un sursis à statuer, qu'est ce? un déni de justice donc....!
Délibéré au 15 mai 2013 ...! Voila où en est notre justice française !
grald130 a écrit le 06/02/2018 à 20:48:15
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Cher Maitre
Un cas précis : au tribunal de commerce à prononcé un premier sursis à statuer en 2014 suite à une plainte au pénal déposée devant le procureur de la république par la partie adverse la veille de l'audience de plaidoiries , après appel autorisé par le premier président ce sursis à été annulé en appel en janvier 2015 au motif que l'action publique n'a pas été mise en mouvement . Retour devant le tribunal de commerce, la partie dépose une plainte avec constitution de partie civile février 2015 avec constitution dépôt de consignation et le tribunal de commerce prononcé à nouveau le sursis à statuer. A nouveau appel de ce sursis à statuer, la cour d'appel confirme en octobre 2015 le sursis à statuer cette fois.
En septembre 2017 sans qu'il n'y ait eu intervention des partie le tribunal de commerce rappelle l'affaire en audience pour 2018.
Ma question est : le juge de mise en l'état peut il révoquer le sursis à statuer malgré le rejet par la cour d'appel concernant la demande de sa suppression 2 ans plus tôt, si oui la décision du juge de la mise en l'état sera telle elle même succeptible d'être frappé d'appel par autorisation du premier président de la cour d'appel ou bien est ce quenfin l'affaire pourra être traitée par le tribunal de commerce.
Merci
Respectueuses salutations

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