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Le droit des affaires OHADA doit être revisé sur bien des points
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Quelques precisions sur le sort des engagements de la caution decedee dans l'ohada
Procédures en Justice
| Lu 13648 fois | 0 réactionLes sûretés sont les moyens accordées au créancier par la loi ou la convention des parties pour garantir l'exécution des obligations.
Parmi ces sûretés, le cautionnement est celle qui reçoit de plus en plus la faveur des créanciers qui y trouvent une garantie peu complexe tant dans sa formation que ses modalités.
Pourtant, la combinaison du droit du cautionnement et du droit successoral peut parfois réserver de bien étranges surprises.
Le cautionnement est défini par l'Acte Uniforme portant organisation des sûretés en son article 3, comme un contrat par lequel la caution s'engage envers le créancier qui accepte, à exécuter l'obligation du débiteur si celui-ci n'y satisfait pas lui-même.
La caution ne sera alors tenue de payer la dette qu'en cas de non paiement du débiteur principal.
Mais quel est le sort de l'engagement pris par la caution au cas où elle venait à décéder ?
Il est de principe bien établi que, le patrimoine du de cujus passe à son héritier après sa mort.
Il en découle que la caution transmet à son héritier l'ensemble de ses engagements.
Supposons dans un premier temps qu'une personne se porte caution pour son ami lors de l'achat d'une automobile.
Au décès de cette personne (caution), son héritier devra-t-il supporter le paiement de l'automobile si l'acquéreur devenait défaillant ?
Supposons ensuite qu'une personne se porte caution lors de la location d'une maison pour un de ses fils.
Au décès de cette personne (caution), son héritier devra-t-il supporter les loyers impayés par le locataire dans le cas ou celui-ci ne les règle plus ?
L'application au contrat de cautionnement du principe de la succession aux dettes du de cujus mérite alors qu'on s'y attarde un instant.
Dans le premier cas, il s'agit de cautionnement de dettes présentes et déterminées, l'héritier de la caution est tenu pour la dette de l'acquéreur puisqu'elle existait déjà au jour du décès.
L'engagement de garantie est transmis au décès de la caution à ses ayants cause universels ou à titre universel (héritiers et légataires autres que les légataires particuliers).
En revanche, dans le second cas, il s'agit d'un cautionnement de dettes futures et indéterminées, comme les loyers à venir, la réponse appelle alors plus de nuances.
Est-ce que les héritiers de la caution doivent garantir le paiement de toutes les dettes du débiteur principal couvertes par le cautionnement, y compris celles qui n'auraient pris naissance qu'après le décès de la caution, comme les loyers à venir, ou bien si l'obligation transmise a pour seul objet les dettes déjà nées au moment du décès ?
Pendant longtemps, la Cour de cassation française a estimé que l'obligation des héritiers de la caution ne se limitait pas aux dettes existant au jour de son décès mais s'étendait également aux dettes nées postérieurement[1].
La même chambre commerciale de la Cour de cassation française devait opéré un revirement complet deux ans plus tard en posant dans un arrêt de principe que, les héritiers de la caution décédée doivent garantir le paiement des dettes du débiteur principal qui étaient déjà nées au moment du décès mais, en revanche, n'ont pas à garantir le paiement des dettes du débiteur principal nées après le décès de la caution[2].
C'est cette dernière position de la jurisprudence française qui a été retenue par les rédacteurs de l'Acte Uniforme.
En précisant à l'alinéa 3 de l'article 25 de l'Acte Uniforme que, « les engagements de la caution ( ) passent à ses héritiers uniquement pour les dettes nées antérieurement au décès de la caution », le législateur de l'OHADA va plus loin que son homologue français en tranchant définitivement le débat et en donnant à l'arrêt de principe de 1982 une force désormais incontestable.
La caution ne transmet pas d'engagements à son héritier pour les dettes nées après son décès.
Cette position du législateur semble logique dans la mesure où dans le cadre d'un cautionnement successif et général, le décès de la caution ne devrait avoir un effet extinctif qu'à l'égard des dettes futures non encore nées.
En conséquence, les héritiers ne sont tenus qu'au paiement des seules dettes garanties qui étaient nées à la date du décès de la caution. Dès lors que la dette du débiteur principal a pris naissance avant le décès de la caution, l'héritier reste tenu et ne peut se soustraire à l'exécution de l'obligation de paiement.
On pourrait donc déjà conclure que si le décès de la caution a un effet extinctif dans le cas d'un cautionnement de dettes futures et indéterminées, au sens de dettes non existantes mais éventuellement appelées à naître dans l'avenir, il ne produit pas le même effet dans le cas d'un cautionnement de dettes présentes et déterminées, au sens de dettes existantes.
Mais à partir de quel moment nait la dette de la caution ?
Il faut distinguer l'exigibilité de la dette de la caution de sa naissance.
Si l'on excepte l'hypothèse de la stipulation à son profit d'un terme plus éloigné que celui fixé au débiteur principal[3], la dette accessoire de la caution devient en principe exigible au moment même où l'est la dette principale. C'est à partir de ce moment que la caution peut être poursuivie.
La question de l'exigibilité de la dette de la caution trouve donc sa réponse, en principe, dans le caractère accessoire du cautionnement.
Il va de soi que le créancier ne peut pas poursuivre la caution alors que sa créance n'est pas exigible.
Il ne faudrait pas en revanche y comprendre que la dette de la caution nait à partir de son exigibilité. L'engagement de payer la dette est transmis aux héritiers si la dette a pris naissance avant le décès de la caution, même si elle n'était pas encore exigible à cette date.
Supposons qu'une personne se porte caution pour l'octroi d'un prêt à la société dont il a la gestion. Six mois après son décès, la société traverse des difficultés financières et ne parvient plus à régler les échéances.
L'héritier du de cujus est-il tenu au remboursement ?
La déchéance du terme prévue à l'article 13 de l'Acte Uniforme, quelle qu'en soit sa cause, a pour effet de rendre la dette exigible.
Toute déchéance du terme même postérieure au décès de la caution n'a pour conséquence que l'exigibilité de la dette et non sa naissance.
S'agissant alors de dette à terme, le terme n'affecte que l'exigibilité de l'obligation de remboursement et non son existence, de sorte que la dette existe dès la formation du contrat de prêt.
Une dette devenue exigible seulement après le décès de la caution peut avoir sa naissance antérieurement au décès, soit à la date de l'engagement du débiteur principal et de la caution[4].
Les dispositions de l'article 25 de l'Acte Uniforme ne requièrent donc pas que l'obligation de la caution soit exigible lors du décès de celle-ci, mais seulement qu'elle ait pris naissance antérieurement au décès.
La naissance de la dette de la caution remonterait à la date de formation du contrat principal, soit à la remise des fonds au débiteur principal et à l'engagement de la caution.
L'obligation de règlement résultant d'un prêt ou d'une ouverture de ligne de crédit notamment est ainsi maintenue après le décès de la caution, passant à ses héritiers[5], mais non l'obligation de couverture résultant de la garantie d'un compte bancaire par exemple[6].
L'obligation de règlement, s'agissant de dettes par hypothèses nées avant le décès, doit indiscutablement être considérée comme transmise aux héritiers, même si ces dettes ne deviennent exigibles que postérieurement. Telle est, au demeurant, la solution résultant du droit commun de la transmission passive.
Tandis que l'obligation de couverture[7] doit être considérée comme éteinte par le décès de la caution. Elle répond à la considération que si les obligations se transmettent, le lien contractuel est dénoué par le décès. Comment d'ailleurs le de cujus pourrait-il transmettre à ses héritiers des dettes qui n'existaient pas au jour de son décès ?
Il revient alors dès à présent aux juridictions de l'espace OHADA d'entériner l'idée émise par C. MOULY dans sa thèse de doctorat en ce qu'il faut distinguer entre obligation de règlement et obligation de couverture pour apporter une solution à la problématique du sort des engagements de la caution décédé[8].
Le décès de la caution et, plus généralement, toute transmission universelle du patrimoine d'une caution devraient donc être considérés comme des causes d'extinction de l'obligation de couverture de la caution, au même titre que la résiliation de l'engagement, l'arrivée du terme ou que l'extinction de l'obligation principale.
[1] Cour de cassation, Chambre commerciale 14 novembre 1980
[2] Voir Cass com, 29 juin 1982 ; n° Juris Data 1982 701754 R.T.D Civ 1983, P. 354 obs Rémy
[3] Voir J Cl. Civil Code, Art 2011 à 2043, Fasc. 30, ou Notarial Répertoire V° cautionnement, Fasc. 30
[4] Voir en droit français, Cass. 1re civ, 20 juill 1994 : JCP N 1995. 652 note L. LEVENEUR / Cass 1re civ, 10 juin 1997 : Bull civ 1997, I, n° 194
[5] Vr par exemple, C. A Riom 11 janv 1995 : Juris-data n° 041245
[6] Voir M. CABRILLAC et C. MOULY, Droit des sûretés : Litec, 7e éd 2004, n° 167 et 184
[7] Vr M. Cabrillac, Obligation de couverture, obligation de règlement et cautionnement du solde du compte courant, Mélanges Mouly, Litec, 1999, tome 2, p. 293
[8] Vr Les causes d'extinction du cautionnement, Bibl. de droit de l'entreprise, préf. M. Cabrillac, 1980, n° 352