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Droit du travail

Abandon de poste
Licenciement et rupture conventionnelle

Bonjour,
J'ai abandonné mon poste de femme de chambre il y a 7 mois mon employeur n'a pas procédé à un licenciement,il m'a simplement une lettre AR me demandant les raisons de mon absences (je n'ai pas donné suite). Ensuite il m'a envoyé un bulletin de paie à 0 euro. Je lui ai proposé une rupture conventionnelle qui m'a été refusé, je ne veux pas démissionner. Quels sont les solutions pour me sortir de là?
On m'a parlé de rompre mon cdi par une prise d'acte de rupture pour manquement de remise de mission. Est ce possible? Comment y procéder? Merci pour vos réponses


Question posée le 26/12/2011

Par Myrabelle

Département : Doubs (25)


Mots clés de cette question :abandon de posteprise d'acteprise d'acte.
Date de la réponse : le 27/12/2011

Un abandon de poste est la situation résultant de l'absence non autorisée ou non justifiée par des motifs légitimes d'un salarié à son poste de travail.
Cela constitue un manquement aux obligations du salarié, que l'employeur peut sanctionner en vertu de son pouvoir disciplinaire. La prudence commande à l'employeur d'engager une procédure de licenciement, l'abandon de poste étant le plus souvent considéré comme une faute grave.
La procédure disciplinaire est enfermée dans des délais très stricts : « Aucun fait fautif ne peut donner lieu à lui seul à l'engagement des poursuites disciplinaires au-delà d'un délai de deux mois à compter du jour où l'employeur en a eu connaissance, à moins que ce fait ait donné lieu dans le même délai à l'exercice de poursuites pénales » (C. trav., art. L. 1332-4).
En d'autres termes, dès que l'employeur a connaissance d'une faute commise par un salarié, il dispose d'un délai de deux mois pour engager les poursuites disciplinaires, c'est-à-dire pour convoquer le salarié à un entretien préalable ou pour lui adresser un avertissement.
Au-delà, la faute est prescrite, ce qui signifie qu'elle ne pourra plus être invoquée à l'appui d'une sanction disciplinaire.
Toutefois, une faute ancienne de plus de deux mois pourra être sanctionnée si, dans l'intervalle, l'employeur a engagé des poursuites pénales (C. trav., art. L. 1332-4) ou si cette faute s'inscrit dans un phénomène répétitif (ex. : retards répétés), la dernière faute constatée devant, elle, se situer à moins de deux mois.
L'enjeu est d'importance puisqu'une sanction disciplinaire fondée sur une faute prescrite encourt la nullité. Lorsque la sanction se traduit par un licenciement, celui-ci sera nécessairement jugé sans cause réelle et sérieuse.
L’employeur qui a laissé passer le délai, va laisser perdurer la situation jusqu’à ce que le salarié démissionne. Surtout si cette absence ne lui a rien couté.





La prise d'acte constitue une « réponse » à ce que le salarié considère comme un manquement de l'employeur à ses obligations contractuelles – non-paiement du salaire, par exemple, modification imposée du contrat de travail, actes de harcèlement moral... : ne pouvant laisser perdurer une situation qui lui fait grief, il va prendre l'initiative de rompre son contrat de travail mais il imputera la responsabilité de cette rupture à l'employeur.
La prise d'acte peut s'exprimer comme telle – « je prends acte de la rupture de votre fait » ou d'autres façons qui signifient la même chose – « je considère mon contrat comme rompu de votre fait », « je me considère comme licencié » : quelle que soit la formulation choisie, le salarié manifeste clairement qu'il n'entend pas assumer la responsabilité de la rupture et que son initiative de rupture n'est surtout pas une démission. Lorsqu'un salarié « prend acte de la rupture de son contrat de travail en raison des faits qu'il reproche à son employeur, cette rupture produit les effets, soit d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient, soit, dans le cas contraire, d'une démission » (Cass. soc., 25 juin 2003, no 01-42.335 ; Cass. soc., 25 juin 2003, no 01-42.578 ; Cass. soc., 25 juin 2003, no 01-43.679, Bull. civ. V, no 209 ; Cass. soc., 17 févr. 2004, no 01-42.427 ; Cass. soc., 12 oct. 2004, no 02-44.883, Bull. civ. V, no 249).
a) Des manquements d'une gravité suffisante
Pour que la prise d'acte produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse, les faits invoqués par le salarié doivent non seulement être établis, mais constituer des manquements suffisamment graves pour caractériser une rupture imputable à l'employeur.

Cordialement,

Date de la réponse : le 27/12/2011

Je complète ma réponse précédente:

Il en sera ainsi de comportements délibérés rendant impossible la poursuite des relations contractuelles tels que :
la modification unilatérale du contrat de travail (Cass. soc., 13 juill. 2005, no 03-45.247 ; Cass. soc., 9 avr. 2008, no 07-40.668 : modification des conditions de rémunération) ;
le non-paiement du salaire (Cass. soc., 6 juill. 2004, no 02-42.642) ;
le fait de ne pas rémunérer l'intégralité des heures de travail effectuées par le salarié, de ne rémunérer que partiellement les heures supplémentaires et de ne pas régler intégralement les indemnités de repas (Cass. soc., 20 janv. 2010, no 08-43.476) ;
les mesures vexatoires, les agissements constitutifs de violences morales et psychologiques (Cass. soc., 26 janv. 2005, no 02-47.296, Bull. civ. V, no 23), d'atteinte à l'intégrité physique (Cass. soc., 30 oct. 2007, no 06-43.327, Bull. civ. V, no 177) ;
le fait de ne pas prendre les mesures permettant de protéger une salariée contre les agissements d'harcèlement moral et sexuel d'un supérieur hiérarchique et, ce même si l'employeur a réagi aussitôt qu'il a eu connaissance de la « détresse » de la salariée. Il a en effet failli à son obligation de sécurité de résultat (Cass. soc., 3 févr. 2010, no 08-44.019 ; voir aussi, pour une solution analogue, Cass. soc., 3 févr. 2010, no 08-40.144 P+B).
le non-respect du repos hebdomadaire (Cass. soc., 7 oct. 2005, no 01-44.635), des repos compensateurs (Cass. soc., 9 mai 2007, no 05-40.315, Bull. civ. V, no 70) ;
le manquement à l'obligation de sécurité (Cass. soc., 29 juin 2005, no 03-44.412, Bull. civ. V, no 219, espèce où le laxisme de l'employeur en matière de lutte contre le tabagisme a légitimé une prise d'acte de la rupture) ;
l'exclusion de la part variable de la rémunération, de l'assiette de calcul de l'indemnisation conventionnelle due en cas de maladie (dans cette affaire, la convention collective n'excluait du maintien de salaire que les primes et les gratifications – Cass. soc., 19 mai 2009, no 07-45.692, no 1076 F-P+B) ;
le fait de ne pas réintégrer une salariée, de retour d'un congé de maternité, dans ses anciennes fonctions ou dans des fonctions équivalentes. En l'espèce, une enseignante cumule ses fonctions pédagogiques avec des tâches d'encadrement. A son retour, elle est réaffectée dans la classe où la directrice de l'école est le professeur principal. Il s'ensuit inévitablement la perte d'une partie de ses fonctions d'encadrement, ce qui, d'une part, constitue une modification du contrat de travail et, d'autre part, est une circonstance suffisante pour que la prise d'acte de rupture produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse (Cass. soc., 3 févr. 2010, no 08-40.338).
En revanche, un manquement ponctuel de l'employeur à ses obligations contractuelles, explicable par des circonstances indépendantes de sa volonté, sans que soit en cause sa bonne foi, ne saurait légitimer une prise d'acte de la rupture à ses torts.
Ainsi, le non-règlement du salaire par une association en difficulté n'a pas été jugé suffisant pour justifier une prise d'acte intervenue, il est vrai, au moment où la situation allait être débloquée (Cass. soc., 4 nov. 2003, no 01-44.740), un décalage d'un jour ou deux dans le paiement du salaire, explicable par l'incidence de jours fériés, ne saurait davantage suffire à justifier une prise d'acte (Cass. soc., 19 janv. 2005, no 03-45.018, Bull. civ. V, no 12).
Dans le même esprit, il faut considérer, à notre sens, qu'une erreur matérielle dans le calcul du salaire ou le non-versement ponctuel d'une prime ne peuvent légitimer une prise d'acte par le salarié.
D'une manière générale, il ne suffit pas qu'un salarié soit fondé dans ses revendications à l'appui de sa prise d'acte pour que celle-ci soit nécessairement justifiée. Dans leur appréciation, les juges peuvent prendre en considération son caractère prématuré au regard notamment de l'attitude conciliante de l'employeur (Cass. soc., 2 juill. 2008, no 07-41.372).

b) Portée des griefs énoncés dans la lettre de prise d'acte

Pour apprécier si la prise d'acte est ou non justifiée, les juges ne sont pas liés par les griefs énoncés dans la lettre qui la notifie.
En effet, « l'écrit par lequel le salarié prend acte de la rupture du contrat de travail en raison de faits qu'il reproche à l'employeur ne fixe pas les limites du litige » ; dès lors « le juge est tenu d'examiner les manquements de l'employeur invoqués devant lui par le salarié, même si celui-ci ne les a pas mentionnés dans cet écrit » (Cass. soc., 29 juin 2005, no 03-42.804, Bull. civ. V, no 223 ; Cass. soc., 15 févr. 2006, no 03-47.363 ; Cass. soc., 9 avr. 2008, no 07-40.668).
En d'autres termes, le salarié ne saurait être « enfermé » dans les griefs qu'il invoque dans sa lettre de prise d'acte. S'il en existe d'autres, à condition que le salarié soit en mesure de les établir et qu'ils soient antérieurs à la date où il a pris acte, il peut les faire valoir devant le juge.
Remarques
Avec cet arrêt, la Cour de cassation a levé une ambiguïté contenue dans un précédent où elle énonçait que « seuls les faits invoqués par le salarié à l'appui de sa prise d'acte permettent de requalifier la démission en licenciement » (Cass. soc., 19 oct. 2004, no 02-45.742). Une telle formulation laissait entendre que la lettre de prise d'acte, à l'instar de la lettre de licenciement, fixait les limites du litige et interdisait au salarié, dans le cadre d'une action en justice, d'en ajouter ou d'en substituer d'autres pour justifier son initiative. La présente solution se justifie dans la mesure où, contrairement au droit du licenciement, il n'existe pas de formalisme imposé à la prise d'acte, pas plus d'ailleurs qu'à la démission. Dès lors que l'une et l'autre peuvent être formulées verbalement, le choix du salarié en faveur d'un écrit ne saurait jouer à son détriment.

c) Charge de la preuve

C'est au salarié, et à lui seul, qu'il incombe d'établir les faits allégués à l'encontre de l'employeur. S'il n'est pas en mesure de le faire, s'il subsiste un doute sur la réalité des faits invoqués à l'appui de sa prise d'acte, celle-ci doit produire les effets d'une démission (Cass. soc., 19 déc. 2007, no 06-44.754, Bull. civ. V, no 219 ; Cass. soc., 9 avr. 2008, no 06-44.191).
Toutefois, la Cour de cassation admet implicitement que le fait pour un employeur de ne pas avoir procédé à l'adaptation de poste préconisée par le médecin du travail concernant un salarié déclaré partiellement inapte à son emploi, peut justifier une prise d'acte, par celui-ci, de la rupture de son contrat aux torts de l'entreprise.
La Cour précise, à cette occasion, que c'est à l'employeur de justifier des mesures prises pour adapter le poste de travail du salarié ou des raisons qui les rendaient impossibles. Ce n'est pas au salarié de prouver que son employeur n'a pas respecté ses obligations en la matière (Cass. soc., 14 oct. 2009, no 08-42.828 FS-P+B+R).
On observera que contrairement au droit du licenciement, le doute profite en quelque sorte à l'employeur, ce qui fait bien de la prise d'acte une initiative risquée.

Bon courage

Date de la réponse : le 28/12/2011

Cette réponse a été supprimée par son auteur.

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